Le Canton a tranché
Cette visite de l'UDC dans cette école vaudoise «n'aurait pas dû avoir lieu»

La visite d'une délégation UDC à l'École des métiers de Lausanne le 6 septembre «n'aurait pas dû avoir lieu», affirme le Département vaudois de la formation, qui parle de «propagande». Les candidats ne sont pas entrés en contact avec les élèves, assure le directeur.
Publié: 12.09.2023 à 13:30 heures
|
Dernière mise à jour: 12.09.2023 à 14:24 heures
AmitJuillard.png
Amit JuillardJournaliste Blick

Le Canton a tranché. «Cette visite de candidats aux élections fédérales à quelques semaines des élections pourrait être considérée comme de la propagande, même si elle n’avait pas pour but d’entrer en contact avec les élèves, écrit Julien Schekter, porte-parole du Département vaudois de l’enseignement et de la formation (DEF), dans un e-mail adressé à Blick ce 11 septembre. Elle n’aurait pas dû avoir lieu pour préserver la neutralité de l’école.»

Depuis le 6 septembre, une publication Facebook de Michaël Buffat, candidat de l’Union démocratique du centre (UDC) au Conseil des États, agace la gauche. Le cliché montre dix membres du parti conservateur qui briguent un siège à Berne le 22 octobre. «Visite de l’ETML à Lausanne», raconte la légende (de la photo).

«
«Cet événement ne fait que renforcer le Département et les directions générales dans leur volonté de faire respecter la neutralité de l’école»
Julien Schekter, porte-parole du Département de l'enseignement et de la formation
»

Cette incursion agrarienne au sein de l’École des métiers (ETML) intervient alors que le conseiller d’État libéral-radical Frédéric Borloz a interdit les débats contradictoires entre politiques dans les écoles et les lieux de formation dix semaines avant une élection. Et ce, pour éviter la «pêche aux voix». Une décision soutenue par… l’UDC, alliée du gouvernement à majorité de droite.

Cette incursion UDC au sein de l’ETML intervient peu après que le conseiller d’Etat libéral-radical Frédéric Borloz, soutenu par le parti conservateur, a interdit les débats contradictoires entre politiques dans les écoles en période d'élection. Et ce, pour éviter la «pêche aux voix».
Photo: DR

Contradictoire?

Cette nouvelle directive avait fait bondir la gauche, mais pas seulement. Gerhard Pfister, président du Centre au niveau national, l’avait aussi démontée sur X (ex-Twitter). Après avoir perdu un vote à ce sujet au Grand Conseil le 29 août, la gauche — Parti socialiste (PS) en tête — avait annoncé vouloir déposer un recours à la Cour constitutionnelle. C’est chose faite depuis ce 11 septembre.

La pilule ne passe décidément pas. Et ça se sent jusque dans les commentaires sous le post incriminé de Michaël Buffat. «Pendant ce temps, l’UDC vote contre les débats dans les écoles en période électorale, peste Jean-Michel Favez, ancien président du PS vaudois. On sait depuis longtemps que ce ne sont pas les contradictions qui vous font peur!»

Dans son courriel, le DEF, qui précise qu’il n’avait pas eu vent de cette visite avant de voir le cliché sur les réseaux sociaux, persiste et signe. «Cet événement ne fait que renforcer le Département et les directions générales dans leur volonté de faire respecter la neutralité de l’école, ce qui est le but de la directive sur la suspension des débats électoraux sur temps scolaire pendant les 10 semaines précédant les élections fédérales.»

«Aucun contact avec les élèves»

Par la plume de son communicant, Frédéric Borloz souligne cependant être «rassuré par les explications de l’école sur les circonstances et sur le déroulement de la visite. Particulièrement parce «qu’elle n’avait pas pour but d’entrer en contact avec les élèves».

«Nos adversaires essaient de récupérer cette histoire qui n'a rien à voir avec leur volonté de faire de la propagande en organisant des débats politiques entre candidats devant les élèves», appuie Michaël Buffat, conseiller national et candidat UDC au Conseil des États.
Photo: KEYSTONE/Jean-Christophe Bott

Contacté ce mardi matin, Michaël Buffat prend note de la prise de position du Département. Le quadragénaire assure néanmoins n’avoir «eu aucun contact direct avec les élèves». «Nous n’avons pas été présentés, ajoute le citoyen de Vuarrens, dans le Gros-de-Vaud. Je ne suis même pas sûr que les élèves savaient qui nous étions. Le but de cette visite, organisée par mon collègue au Conseil national Jacques Nicolet (ndlr: également UDC), était que le directeur nous présente le fonctionnement de l’ETML. L’apprentissage et la formation duale sont au cœur de notre programme.»

«J’aurais dû annuler cette visite»

Même son de cloche du côté de Christophe Unger, directeur de l’ETML, joint par Blick lundi après-midi: «Il n’y a pas eu de communication entre les membres de la délégation, qui n’ont pas été annoncés lors de nos passages dans les ateliers, et les élèves.» «Je regrette toutefois le timing de cette visite, qui était planifiée depuis le mois de juin. Comme ce n’était pas un débat et qu’il n’y avait pas de discussion avec les élèves, je me suis dit qu’elle pouvait avoir lieu. Mais au vu de la nouvelle directive, j’aurais dû l’annuler.» Christophe Unger mentionne encore que l’ETML accueille régulièrement des délégations vaudoises, suisses ou étrangères.

Sur le fond, l’UDC, critique face à un corps enseignant «orienté» politiquement et partisane de la neutralité de l’école, n’aurait-elle pas dû s’abstenir d’y mettre les pieds? Ou, au moins, éviter d’utiliser cette visite pour faire sa pub sur la plateforme de Mark Zuckerberg? «Nos adversaires essaient de récupérer cette histoire qui n’a rien à voir avec leur volonté de faire de la propagande en organisant des débats politiques entre candidats devant les élèves! Il ne faut pas se leurrer: en période électorale, on se rend à un débat dans les lieux de formation pour gagner des voix. En période de votations, c’est différent: c’est un sujet — et non des candidats — qui est au centre de la discussion.»

Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la