Le maire vert répond à l'UDC
Vouloir gommer la Ville de Genève? «C'est d'un mépris invraisemblable», estime le maire

L'UDC Yves Nidegger, député au Grand Conseil genevois, a déposé un projet de loi pour que l'État absorbe et gère l'administration de la capitale cantonale. Une idée «anticonstitutionnelle» et «condescendante», juge le maire écologiste, qui a souhaité lui répondre.
Publié: 03.10.2023 à 20:24 heures
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Dernière mise à jour: 07.11.2023 à 12:10 heures
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Lucie FehlbaumJournaliste Blick

Fini la Ville de Genève, les autorités communales doivent disparaître et leur gestion passer en mains cantonales, expliquait Yves Nidegger ce mardi à Blick. Le député de l'Union démocratique du centre (UDC) au Grand Conseil genevois s'inspire du modèle de Bâle-Ville, où le Parlement cantonal est aussi celui de la Ville de Bâle.

Il a ainsi déposé, le 1er septembre, un projet de loi en ce sens. Sur nos plateformes, l'ex-conseiller national n'a pas mâché ses mots, dénonçant des «politiciens de gauche» élus par des «personnes assistées», taclant au passage le maire écologiste de la cité de Calvin et sa «folie des grandeurs».

Ce dernier, élu des Vert-e-s au Conseil administratif (exécutif) depuis 2020, à sa tête depuis juin, a souhaité lui répondre. Alfonso Gomez s'offusque d'une «proposition outrancière», comme il le confie à Blick. Le maire juge le projet de loi d'Yves Nidegger «condescendant» et «anticonstitutionnel». Mais il y voit surtout un coup médiatique.

Yves Nidegger avait parlé de «personnes assistées» qui élisent «des politiciens de gauche». Alfonso Gomez lui répond: «Un parti ne devrait jamais tourner le dos à ceux qui ne peuvent pas boucler leur fin de mois.»
Photo: Keystone

«Mépris invraisemblable»

«Cela me choque quand l’UDC parle d’une surreprésentation massive, en Ville de Genève, de personnes assistées ne payant aucun impôt et élisant des politiciens de gauche. C'est d'un mépris invraisemblable, dénonce Alfonso Gomez. Ceux qui paient des impôts devraient avoir plus de poids? Cela se faisait sous l'Ancien Régime. L'UDC oublie peut-être que cela a conduit à la Révolution...»

À Genève, rappelle le magistrat, environ 30% de citoyens ne gagnent pas le minimum pour être imposés. Il s'agit principalement d'étudiants, de personnes âgées ou de femmes seules. «Peu importe pour qui ces personnes votent, même pour l'UDC si elles le veulent, mais un parti ne devrait jamais tourner le dos à ceux qui ne peuvent pas boucler leur fin de mois.»

Bafouer les valeurs de la Suisse

Par ailleurs, le projet de loi tel qu'il a été déposé «bafoue toute l'histoire de notre pays» en retirant aux habitants de la ville de Genève le droit de vote communal. Le système tel qu'il existe à Bâle-Ville n'est pas simplement un engloutissement de la Municipalité par les autorités cantonales, rappelle le politicien. Le Parlement y est élu à la proportionnelle, et les députés des circonscriptions de Bâle-Ville sont les seuls à pouvoir voter sur les objets qui concernent leur territoire.

Alfonso Gomez sourit à l'idée d'appliquer la même configuration à Genève. En effet, «les six plus grandes communes du canton sont à majorité rose-verte. Avec la proportionnelle, probablement que la majorité du Grand Conseil serait à gauche».

Aucune chance d'aboutir

S'il s'étonne qu'une telle proposition émane d'un parti «qui se dit défenseur des valeurs suisses», le magistrat écologiste n'est pas inquiété par le projet de loi. «Il n'a aucune chance d'aboutir, il est immédiatement attaquable d'un point de vue du droit constitutionnel. C'est simplement un coup médiatique pour faire parler de l'UDC, qui peine à donner des réponses crédibles aux défis actuels des villes. Ils ne font aucune proposition», analyse le magistrat.

En réalité, le problème du parti conservateur, et d'Yves Nidegger en particulier, c'est que les villes votent plutôt à gauche, lance Alfonso Gomez. «L'électorat UDC est plutôt faible dans les centres urbains. C'est pourquoi, depuis 2021, le parti au niveau national promet de lutter contre les 'politiques nuisibles et pique-assiette de la gauche'.»

Citoyens de seconde zone

Quant à sa propre «folie des grandeurs», l'édile note surtout qu'au bout du Léman, l'administration communale est plutôt limitée, en comparaison à d'autres villes suisses. Elle ne gère pas l'énergie, ne collecte plus d'impôt et est moins puissante que d'autres localités pour l'aménagement et la sécurité, appuie le maire de Genève. Le projet du député bourgeois s'attaquerait ainsi à un «non-problème», et «vise simplement à créer des habitants de seconde zone, dépourvus de leurs droits populaires».

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