Les États acceptent un compromis sur la définition du viol
Tamara Funiciello a (en partie) gagné son plus grand combat

Le Conseil des États a accepté mardi une nouvelle définition du viol qui semblait impensable il y a encore quelques années. Une victoire pour la conseillère nationale socialiste Tamara Funiciello et les associations féministes.
Publié: 08.03.2023 à 06:08 heures
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Lea Hartmann

«C’est fou. Je dois d’abord m’asseoir, ensuite, je vais pleurer.» Tamara Funiciello a réagi avec émotion mardi après les discussions au Conseil des États. Ce dernier a adopté une modification de la loi que les organisations féministes et de défense des droits des femmes qualifient de «progrès historique».

La bataille pour le changement de définition du viol fut le combat politique le plus long et le plus dur de la politicienne socialiste jusqu’à présent. Et il a culminé avec une victoire presque totale.

«Non, c’est non» avec une précision cruciale

La définition de viol a été ainsi précisée et complétée. Il ne s’agit plus seulement d’un acte dans lequel une personne force sa victime à avoir des relations sexuelles. Est désormais punissable tout acte sexuel commis contre la volonté d’une personne.

Tamara Funiciello sort victorieuse de la bataille pour le nouveau droit pénal en matière sexuelle.
Photo: Keystone
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Le Conseil des États s’est ainsi prononcé en deuxième délibération sur le nouveau droit pénal en matière sexuelle pour une sorte de solution élargie du «Non, c’est non». Ainsi, la loi prend explicitement en compte la possibilité qu’une personne tombe dans un état de sidération et de choc et ne puisse donc pas se défendre contre un viol. Ce cas de figure est dorénavant considéré comme un «non» non verbal.

Il est pratiquement certain que le Conseil national approuvera ce compromis en juin prochain. À la fin de l’année dernière, il s’était prononcé, contrairement au Conseil des États, en faveur de la solution plus large du «Seul un oui est un oui». Cette option aurait permis d’inscrire le consentement mutuel dans la loi comme condition pour qu’un rapport sexuel ne soit pas considéré comme un viol. L’affaire était alors retournée au Conseil des États.

Un des débats les plus approfondis

L’issue des discussions de mardi ne correspond certes pas à 100% à ce qu’espéraient Tamara Funiciello et les autres partisans du «Seul un oui est un oui». La conseillère nationale reconnaît toutefois que, sur le plan juridique, il n’y a quasi pas de différence entre la solution adoptée par le Conseil des États et le principe requis par la solution du «Seul un oui est un oui».

La conseillère aux États genevoise Lisa Mazzone a également parlé d’un grand pas accompli avec cette modification. Pour l’écologiste, les longues heures de discussion sur le nouveau droit pénal en matière sexuelle ont constitué «l’un des débats les plus approfondis que nous ayons menés dans notre conseil au cours de cette législature».

La conseillère aux États lucernoise Andrea Gmür (Centre) a par ailleurs qualifié la modification de la loi de «très importante».

Focalisation sur les délinquants

Dans la nouvelle loi, le Conseil des États met de plus l’accent sur les auteurs de violences. Les tribunaux pourront à l’avenir obliger les délinquants sexuels à participer à ce que l’on appelle des programmes d’apprentissage. Ces derniers doivent permettre aux agresseurs de travailler sur leurs actions afin d'éviter la récidive.

Il y a quelques années encore, il semblait pratiquement impensable que le Parlement parvienne à un tel compromis. S’il a finalement eu lieu, c’est grâce à l’énorme travail de lobbying de Tamara Funiciello et de ses compagnes. «Nous avons travaillé dur avant même que le sujet ne soit sur le radar», se rappelle la socialiste. La conseillère nationale avait également tiré les ficelles en coulisses pour que la commission juridique du Conseil des États s’oriente finalement vers le compromis qui a obtenu mardi l'adhésion de la Chambre.

«Nous avons cru à la victoire jusqu’au bout»

Tamara Funiciello souligne que si le changement de paradigme a pu avoir lieu, c’est aussi parce que de nombreuses personnes concernées ont osé raconter leur histoire. Elle se souvient qu’une femme lui avait raconté son viol lors d’une rencontre fortuite à la Migros. Cela l’avait profondément touchée.

«Nous avons cru à la victoire jusqu’au bout», se félicite la Bernoise. Le combat a porté ses fruits, pour elle et ses camarades de lutte.

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