Mais Berset s'y oppose!
Cassis veut interdire le Hamas par une loi d'urgence

Le ministre des Affaires étrangères Ignazio Cassis veut contourner le processus législatif ordinaire et classer au plus vite le Hamas comme organisation terroriste. Mais des voix résistantes s'élèvent au sein du Conseil fédéral.
Publié: 15.11.2023 à 14:56 heures
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Dernière mise à jour: 15.11.2023 à 14:57 heures
Robin Bäni

Le ministre des Affaires étrangères Ignazio Cassis veut faire vite. Le Hamas doit être interdit en Suisse et classé comme organisation terroriste. Et ce, par le biais d'une loi spéciale. Il aurait soumis une proposition en ce sens au Conseil fédéral, comme l'ont confirmé différentes sources à Blick, authentifiant les informations du «Tages-Anzeiger». Mais selon ces informations, le ministre de l'Intérieur Alain Berset s'est opposé aux projets dans un co-rapport.

Une loi spéciale raccourcirait le processus législatif ordinaire. Et Cassis estime manifestement que c'est nécessaire. Ainsi, il souhaite que le Conseil fédéral soumette la loi d'urgence au Parlement. Si les deux chambres l'approuvent, l'interdiction du Hamas entrera immédiatement en vigueur. Un éventuel référendum pourrait ainsi être évité. Cela signifie que les droits populaires seraient limités.

L'ONU ne considère pas le Hamas comme terroriste

Avec l'interdiction, Ignazio Cassis prévoit d'agir contre d'éventuelles activités du Hamas en Suisse. Il serait par exemple possible de sanctionner un soutien propagandiste au Hamas.

Le conseiller fédéral Ignazion Cassis s'active: il veut interdire le Hamas par une loi d'urgence.
Photo: keystone-sda.ch

L'Etat islamique et Al-Qaida sont interdits en Suisse. Le Hamas, en revanche, ne l'est pas, car la loi suisse ne peut interdire que les organisations qui sont également proscrites par l'ONU. Mais pour contourner cette interdiction, Cassis veut édicter une loi spéciale.

Début octobre, le gouvernement suisse avait déjà décidé d'interdire le Hamas. Des mesures juridiques devaient être examinées à cet effet. Mais le Conseil fédéral s'y oppose désormais. Selon les informations, Alain Berset aurait remis un co-rapport. Il y critique le fait qu'une interdiction du Hamas constituerait un dangereux précédent.

Cassis est sous pression

Le fait que Cassis insiste sur une loi spéciale est probablement dû à l'énorme pression politique. Après l'attaque du Hamas, des politiciens de gauche comme de droite ont exigé que la Suisse classe l'organisation comme terroriste. Même la commission de sécurité du Conseil national a pris cette décision sans aucune opposition.

Par le passé, la Suisse s'est toujours abstenue de prononcer de telles interdictions indépendantes. Ni le mouvement des Tigres de libération de l'Eelam Tamoul, ni l'Armée républicaine irlandaise, ni les Farc colombiennes n'ont été classées comme terroristes par la Suisse.

Une interdiction serait incohérente

Dans le «Tages-Anzeiger», le professeur de sciences politiques bâlois Laurent Goetschel s'oppose également à la classification d'acteurs politiques comme organisations terroristes. Même si ces dernières commettent des atrocités.

«Jusqu'à présent, la Suisse n'a volontairement pas tenu de liste d'organisations terroristes, car elle voulait se réserver le droit de parler avec tous les acteurs potentiels des conflits», explique Laurent Goetschel. De son point de vue, il serait plus sage pour la Suisse de résister à la pression politique et d'expliquer le principe de sa position, plutôt que de courir le risque d'être considéré plus tard comme incohérent et partial.

Le service de renseignement de la Confédération fait remarquer qu'il n'y a pratiquement pas eu d'activités du Hamas en Suisse jusqu'à présent. Des voix critiques estiment donc qu'il n'y a pas lieu d'adopter une loi d'urgence. Toutefois, certains indices laissent penser que le Hamas a également été financé depuis la Suisse. Le Ministère public de la Confédération avait déjà lancé des enquêtes à ce sujet avant l'attaque du Hamas. 

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