Plusieurs statistiques le prouvent
En 30 ans, la prospérité «Swiss Made» a augmenté davantage que prévu

Selon plusieurs statistiques, la population suisse ne profiterait plus de la croissance économique du pays. Mais un regard sur les 30 dernières années montre pourtant que la prospérité «Swiss Made» a augmenté davantage que prévu.
Publié: 22.04.2024 à 11:39 heures
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Dernière mise à jour: 22.04.2024 à 12:07 heures
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Martin Schmidt

La population suisse croît plus rapidement que dans n'importe quel autre pays d'Europe. En chiffres absolus, près de 100'000 personnes ont immigré l'année dernière, ce qui porte à 9 millions le nombre de personnes vivant dans le pays. Une situation qui contribue par ailleurs à une pénurie de logements et une hausse des loyers. Les coûts de la santé et les prix de l'électricité ont, de leur côté, augmenté.

Dans ce contexte, beaucoup ont l'impression que la prospérité globale diminue au niveau individuel. La génération des années 1980 et 1990 aurait-elle été privilégiée?

L'Office de l'économie du canton de Zurich (AWI) s'est penché sur la question pour mesurer l'évolution de la prospérité en Suisse au fil des décennies: «L'augmentation de la prospérité au cours des 30 dernières années est nettement sous-estimée», lance d'emblée Luc Zobrist, responsable de l'économie nationale à l'AWI, à Blick.

La population suisse ne profiterait plus de la croissance économique du pays, selon de nombreuses critiques.
Photo: Keystone
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Prenons par exemple, le produit intérieur brut (PIB) zurichois, corrigé de l'inflation. Ce dernier a augmenté en moyenne de 1,8% par an entre 1991 et 2022. Dans le même temps, le PIB par habitant, corrigé de l'inflation, est passé de 81'000 francs à 104'000 francs, soit une augmentation de 0,8 pour cent par an.

Mais les données montrent aussi que la croissance économique par habitant à Zurich a nettement ralenti au cours du nouveau millénaire. Donc quasiment au même moment que l'introduction de la libre circulation des personnes, qui a nettement accéléré l'immigration dans le canton: «Cela donne l'impression que nous ne faisons que croître en largeur», déclare Luc Zobrist.

La productivité du travail, moteur de la croissance

Or, un facteur décisif est souvent oublié. Ainsi, en Suisse, le PIB par heure travaillée a augmenté de 45 %, soit nettement plus que la croissance par habitant de 29%, en 30 ans. «Les gens gagnent donc nettement plus par heure, mais travaillent en même temps de moins en moins. Il s'agit là aussi d'un gain de prospérité», explique Luc Zobrist. 

À Zurich, le nombre d'heures de travail par habitant a diminué de 80 heures par an. Ainsi, les résidents gagnent presque un demi-après-midi de loisirs supplémentaire par semaine. À l'échelle nationale, le gain de temps libre était encore 50% plus élevé.

Ce qui est surprenant si l'on considère la forte augmentation de l'activité professionnelle chez les femmes. Comment le temps de travail horaire par personne a-t-il fait pour diminuer? En fait, «le temps de travail hebdomadaire pour les temps pleins a diminué et les jours de vacances ont augmenté», explique Luc Zobrist.

Mesurée au PIB par heure travaillée, la prospérité à Zurich, par exemple, a même augmenté de 1,1% par an au cours des 30 dernières années. Ainsi, 58% de la croissance économique sont dus à l'augmentation de la productivité, contre seulement 42% à l'augmentation de la population. Bien que Zurich, en tant que place financière, ait beaucoup plus souffert des conséquences de la crise financière mondiale en 2007, la part de la croissance démographique dans la croissance économique a diminué depuis, même si les deux dernières années ne sont pas encore prises en compte.

Dans le reste de la Suisse, la situation est encore meilleure, l'économie ayant connu une croissance plus forte par rapport à la population.

Près de 60% du PIB suisse a atterri dans les poches de la population active

Cette croissance se répercute également sur les salaires. Ces dernières années, près de 60% de la croissance du PIB en Suisse a atterri dans les poches de la population active, comme le montrent les calculs du Centre de recherches conjoncturelles de l'EPFZ. 

Ces dernières années signent toutefois quelques exceptions. La pandémie de Covid-19 et la guerre en Ukraine ont entraîné des hausses de prix et, mécaniquement, des pertes de salaires dans de nombreuses branches, ce qui a mis à mal l'économie suisse et une mini-crise de la croissance. Mais l'économie suisse s'est déjà remise de crises bien plus importantes en l'espace de quelques années.

Au cours des dernières décennies, il y a eu un autre effet de prospérité qui a été passé sous silence jusqu'à présent: les Suisses «profitent également de la qualité bien plus élevée de nombreux biens et services, ce que le PIB ne permet de saisir que partiellement», explique Luc Zobrist.

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