Remboursement tardif, assurance pas versée...
Après le décès de sa mère, voilà six mois qu'une Genevoise lutte contre Assura

Depuis la perte de sa maman fin mai dernier, une Genevoise enchaîne les problèmes avec l'assurance complémentaire de sa mère. Pourtant, l'assurance promet s'être améliorée.
Publié: 20.11.2023 à 06:11 heures
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Dernière mise à jour: 20.11.2023 à 15:24 heures
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Lucie FehlbaumJournaliste Blick

C'est par lassitude que Sarah* a contacté Blick, mi-octobre. Lassitude d'un dialogue qui est, en fait, son monologue face à Assura. «Ça me demande tellement d'énergie, je n'en peux plus», déplore-t-elle autour d'un café. Tout a commencé à la fin du mois de mai dernier.

Souhaitant obtenir le remboursement de la prime d'assurance maladie de sa mère, qui venait de décéder, cette Genevoise s'est retrouvée en sommation pour des primes reçues... après la disparition de sa maman. L'assurance a fini par rendre ses sous à Sarah, mais n'a toujours pas versé l'assurance décès. Blick est au fait d'au moins un autre cas similaire.

Remboursement «en un mois»

Il faut remonter un peu en arrière pour comprendre le contexte. En 2015, Sarah commence à s'occuper des courses et des factures de sa mère. Pour «éviter les soucis», ces dernières sont payées en avance. C'est notamment le cas pour l'assurance complémentaire, souscrite auprès d'Assura. Lorsque sa mère décède, le 29 mai dernier, sa prime du mois de juin a déjà été réglée par ordre permanent.

La quatrième plus grande caisse de Suisse a connu des retards importants dans le remboursement des prestations, ces deux dernières années.
Photo: KEYSTONE/DR

«J'ai téléphoné le lendemain pour annoncer la nouvelle à Assura, et pour mentionner cette prime réglée trop vite», affirme la Genevoise. On lui indique que cette dernière sera remboursée à la fin du mois, «parce qu'il y a du retard» dans les paiements.

Cocasse, quand on sait qu'Assura vient d'envoyer un courriel à ses clients, promettant s'être améliorée, et rembourser les factures en 15 jours... Après de nombreux problèmes, son directeur s'était même excusé, comme l'avait relaté Blick.

Factures envoyées à une dame décédée

La caisse maladie basée à Pully (VD) promet également à Sarah qu'elle n'a qu'à refuser, dans l'espace client de sa mère sur leur site, les éventuelles «e-factures» qui arriveraient. Et cela ne loupe pas. Non seulement la prime de juin ne lui est pas rendue, mais celles de juillet, août, septembre et octobre lui parviennent. «J'ai même reçu une sommation!»

Pourtant, dès le 8 juin, la quatrième plus grande caisse de Suisse a eu entre les mains l'acte de décès de la maman de Sarah, et la demande de résiliation de la police. Être réactif est une bonne chose, estime Jean Tschopp, responsable du service juridique de la Fédération romande des consommateurs (FRC).

«Si des primes continuent à être envoyées après le décès de l'assurée, elles n'ont pas à être payées par les héritiers», explique le juriste et élu socialiste. En effet, la complémentaire est une assurance personnelle et non-transmissible. Si l'assurée meurt, la police «prend fin avant l'échéance contractuelle prévue».

Promesse tenue?

La réponse fournie par Assura, contactée par Blick, ne correspond pas à la réalité du cas de Sarah. «Selon le délai entre le décès et la réception de son annonce auprès de nos services, il est possible qu’une prime soit prélevée. Celle-ci est naturellement remboursée dès l’enregistrement de l’annonce du décès», informe Charline Gerber, chargée de communication.

Or, la prime a été remboursée trois mois après la réception du document demandé. Où en est Assura de sa promesse d'amélioration et de rapidité – «15 jours pour être remboursé, 7 pour recevoir une réponse à un courrier»? En gros, s'améliorer a pris du temps à la caisse maladie, ce qui a causé... des retards.

«Ces durées mentionnées sont des moyennes enregistrées au mois d’octobre 2023, indique Charline Gerber. Nous avons mené une importante évolution technologique pour proposer des services plus modernes et plus rapides. Malgré les multiples précautions prises en amont, ce projet d'ampleur a entraîné temporairement des retards dans les remboursements et la gestion des demandes de certains de nos clients.»

Pas que du ressort d'Assura

Un deuxième volet est en cours pour Sarah: la perception de l'assurance décès pour laquelle cotisait sa mère, toujours auprès d'Assura. Cette fois, le certificat d'héritiers est en possession de la caisse depuis le 15 septembre. Mais toujours rien. Le délai de traitement ne «dépend pas uniquement de nos services», se défend la caisse basée à Pully.

Les documents requis pour libérer la prime, «à savoir, un certificat des héritiers, le choix du représentant de la succession avec accord des autres héritiers, ainsi que les informations bancaires pour le versement» sont émis par différents organes. Un délai peut donc «être nécessaire».

Mise en demeure, poursuite...

Sarah, à court de ressource, a été conseillée par la FRC pour mettre Assura en demeure. Elle l'a fait mercredi 15 novembre – un document que Blick a pu consulter.

Jean Tschopp, Responsable du service juridique de la FRC, juriste et élu socialiste au Conseil national.

«Il s'agit d'un moyen légal d’obtenir une prestation exigible (le versement d’un capital par exemple en cas de décès) en impartissant un délai au débiteur pour s’exécuter, explique Jean Tschopp, fraîchement élu au National avec les socialistes vaudois. La mise en demeure, qu’il est recommandé de faire par écrit, permet au créancier de recourir à ses prétentions juridiques (action judiciaire ou réquisition de poursuite par exemple) si le débiteur ne s’est pas exécuté dans le délai imparti.»

Pouvoir faire son deuil

Sarah espère que cela va prendre fin. Début septembre, fatiguée de demander inlassablement la même chose et de recevoir de nouvelles factures, elle avait orné une de ses missives d'un grand «POURQUOI?». La goutte de trop a coulé le 6 novembre, après des dizaines d'appels et de courriers. «J'ai téléphoné, encore une fois, pour avoir des nouvelles de l'assurance décès. On m'annonce qu'il n'y a rien dans le dossier de ma mère. J'ai dû tout réexpliquer. Puis, on m'a mise en attente, et ça a raccroché.»

La Genevoise n'a qu'un seul but: pouvoir faire autre chose. «Que l'assurance fasse son travail pour que je puisse faire mon deuil. Ça n'est pas évident, quand on est au bout du fil sans cesse avec une caisse maladie...»

*prénom d'emprunt 

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