Violences à Romans-sur-Isère
Ce terme jugé raciste anime l'actualité française, mais c'est quoi une «ratonnade»?

Le terme «ratonnade» est sur toutes les lèvres en France depuis une semaine. Après la mort de Thomas à Crépol, des groupes de sympathisants d'extrême-droite ont pris la rue, notamment à Romans-sur-Isère, avec l'envie d'en découdre. Mais c'est quoi, une «ratonnade»?
Publié: 02.12.2023 à 15:58 heures
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Dernière mise à jour: 02.12.2023 à 16:07 heures
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Léo MichoudJournaliste Blick

La gauche française a sorti les mots chocs, avec les violences du week-end dernier à Romans-sur-Isère. C'était une «tentative de ratonnade», selon Manuel Bompard, coordinateur politique de La France insoumise (LFI). Le «retour des ratonnades» pour la tête du PS Olivier Faure. «La 'ratonnade' à Romans-sur-Isère», dénonce Fabien Roussel, secrétaire national du Parti communiste français. Jusqu'au sein de la majorité macroniste, les dénonciations de descentes racistes se sont multipliées.

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Sur France Inter, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin s'est exprimé sur «l'ensauvagement de ces milices, qui vont faire des ratonnades, taper des Arabes, attaquer des gens qui ont des couleurs de peau différentes et crient leur nostalgie du IIIe Reich.» Il a annoncé la dissolution de trois groupuscules «d'ultradroite». Mais c'est quoi, exactement, une «ratonnade»?

Origine et histoire

Le mot est issu de «raton», un petit rat qui n'a rien d'anodin. Au 19e siècle, le sens animal est délaissé pour désigner un enfant entrainé à voler. Dans l'argot au 20e siècle, par une extension raciste, «raton» en vient à signifier «arabe» ou «nord-africain», et donc les habitants et les immigrants des anciennes colonies françaises.

Des manifestants pour l'indépendance de l'Algérie, arrêtés par la police à Paris, le 17 octobre 1961. (Fernand Parizot/AFP)
Photo: AFP

La première utilisation de «ratonnade» daterait de 1958, dans le contexte de la guerre d'Algérie. Le terme désigne alors les violences commises deux ans plus tôt par des Français sur des Algériens lors des obsèques d'Amédée Froger, responsable colonial tué par des nationalistes algériens. Il décrit ensuite les violences policières dirigées contre les Algériens, dans les années 1960 et 1970.

Aujourd'hui, le dictionnaire Larousse définit le terme ainsi: «Expédition punitive ou brutalités exercées contre des Maghrébins; par extension, brutalités exercées contre un groupe social.» Les groupes qui organisent une «ratonnade» entreprennent donc des descentes racistes dans les villes et les quartiers avec le but de trouver des personnes issues de l'immigration, en particulier africaine et musulmane, afin de les passer à tabac, voire pire. La vengeance est souvent le motif et la violence est inhérente à la pratique.

Pourquoi on en parle?

En France, la mort de Thomas, poignardé dans la nuit du 18 au 19 novembre lors d'une fête de village à Crépol dans la Drôme, a conduit à des violences dirigées contre des personnes issues de l'immigration, analysées dans Blick comme le «retour des chemises brunes». Le week-end des 25 et 26 novembre, une centaine d’activistes d’extrême-droite ont pris la rue à Romans-sur-Isère, cagoulés et armés de barres de fer, criant «Islam hors d’Europe» et «La rue, la France, nous appartient».

Ils voulaient «en découdre», selon les autorités, avec les jeunes du quartier de la Monnaie, dont seraient issues certaines des personnes impliquées dans la mort du jeune homme. Bilan? Lundi, six personnes ont été immédiatement condamnées par un tribunal correctionnel à des peines de six à dix mois de prison ferme pour «participation à un groupement formé en vue de la préparation de violences» ou «dégradations».

Des rassemblements du même genre ont également eu lieu le week-end dernier dans d'autres villes de France, comme à Rennes, et ont déclenché de nombreux débats. Certains rassemblements d'extrême-droite ont été interdits ce vendredi, selon BFMTV. D'autres seraient prévus ce week-end.

Une question de langue

À l'heure actuelle, «ratonnade» est utilisé aussi bien par les groupuscules d'extrême droite qui organisent ces descentes racistes à vocation violente que par une partie de celles et ceux qui les dénoncent. Reste que certaines personnes issues de la communauté musulmane observent une utilisation à tort et à travers du mot. C'est notamment le cas de la journaliste de «Libération» Nora Bouazzouni.

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(Avec ATS et AFP)

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