Le tapentadol 10 fois plus fort
Cette nouvelle substance inquiète le peloton

Une nouvelle substance circule-t-elle dans le peloton? C'est possible. Son nom: le tapentadol. Si cet antidouleur est aussi puissant que ce qui a été rapporté, cela pose un gros problème. Trois cyclistes suisses se montrent inquiets.
Publié: 20.06.2024 à 19:17 heures
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Mathias Germann

Qui fait du vélo souffre. Ce n'est pas très romantique, mais c'est un fait – du moins dans le cyclisme professionnel. Si quelqu'un n'est pas prêt pour cela, il peut plier bagage. Dans une semaine au plus tard, lorsque 176 coureurs du Tour de France parcourront les 3492 kilomètres prévus, des images de visages déformés par la douleur défileront à nouveau sur les écrans de télévision.

Ils vont grimper six fois à vélo du niveau de la mer au sommet de l'Everest. Fou? Peut-être bien. En même temps, les cyclistes professionnels s'entraînent toute leur vie pour cela. La devise est et reste la suivante: plus c'est facile, mieux c'est. Certes, ils ne s'affament pas à tout prix, sous peine de s'effondrer. Mais le fait est que les coureurs sont tellement à la limite qu'ils peuvent être déséquilibrés par la moindre dysharmonie sous forme de bactéries et de virus. Il en va de même pour les chutes – même si elles ne semblent pas particulièrement graves, le corps a besoin d'énergie pour cicatriser les blessures. Mais où peut-il la trouver sans affaiblir le coureur?

Le tramadol était déjà interdit… mais seulement par l'UCI

On en vient rapidement au thème des analgésiques. À la suite d'un article du journal «Le Temps», le débat sur leur utilisation dans le cyclisme professionnel s'enflamme à nouveau. On y parle d'un produit qui circule depuis peu dans le peloton. Son nom: le tapentadol. Selon l'Union cycliste internationale (UCI), il pourrait être «jusqu'à dix fois plus puissant» que le tramadol.

Y aura-t-il bientôt un nouvel antidouleur interdit dans le cyclisme? Le journal «Le Temps» a jeté un pavé dans la mare.
Photo: imago/Karina Hessland
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Le tramadol? Exactement: ce produit a été placé en 2019 par l'UCI sur la liste des substances interdites, car il n'améliorait pas seulement les performances, mais provoquait aussi des troubles de la concentration et de la somnolence. En 2022, la consommation de tramadol du Colombien Nairo Quintana, vainqueur du Giro en 2014 et de la Vuelta en 2016, a été prouvée – il a été disqualifié a posteriori du Tour de France. En 2024, l'Agence mondiale antidopage lui a emboîté le pas et le tramadol figure désormais également sur la liste noire.

«Je ne veux pas en payer le prix dans 20 ans»

«Le tramadol était surtout populaire chez les sprinters. C'était avant mon époque. Mais on dit qu'à l'époque, ils ont provoqué quelques chutes à cause de leur consommation», explique le cycliste professionnel Mauro Schmid. Il n'est donc pas étonnant que l'UCI ait désormais intégré le tapentadol dans son «programme de surveillance médicale». On veut savoir si le produit est effectivement utilisé.

Mauro Schmid trouve cela logique – on a suffisamment d'échantillons de sang pour en rechercher les traces. Lui-même n'a jamais entendu parler du tapentadol, avoue-t-il. «La question de savoir si et quels analgésiques doivent être autorisés est une question médicale et éthique. En tout cas, je veux être en bonne santé et en forme après ma carrière et je ne serais pas prêt à me faire gaver d'analgésiques et à en payer le prix dans 20 ans.»

Un comprimé par jour?

Le cycliste professionnel argovien Silvan Dillier fait partie du World Tour depuis plus d'une décennie. Il plaide pour une utilisation saine des analgésiques. «Si tu dois avaler un comprimé tous les jours pour pouvoir monter sur ton vélo et parcourir 150 kilomètres, quelque chose ne va pas. Si quelqu'un est vraiment malade ou blessé, il est plus judicieux d'abandonner. Car on ne veut certainement pas de séquelles.»

En cas de symptômes très légers, une aide médicale est acceptable – mais seulement de la même manière que pour d'autres personnes qui ne font pas de vélo tous les jours. La dernière fois qu'on lui a parlé du tapentadol, il n'a encore rien entendu de plus précis, selon Silvan Dillier.

«Cela devrait être interdit»

Au sein de l'équipe EF Education, le paracétamol est le seul antidouleur administré, explique Stefan Bissegger. Il est utilisé en cas de douleurs légères à modérées et de fièvre et est disponible dans toutes les pharmacies. «Le tramadol était déjà d'un tout autre niveau. Les histoires qu'on y entendait…», dit-il sans poursuivre sa phrase.

Que pense-t-il des analgésiques? «Si tu prends quelque chose de léger à l'entraînement ou ailleurs, c'est très bien. Peut-être que tu as aussi besoin de quelque chose de plus fort après une opération. Mais en course? Non, cela ne va pas du tout et devrait être interdit.»

L'UCI va-t-elle ajouter le tapentadol à la liste des substances interdites? On le saura dans les mois à venir. Les cyclistes professionnels suisses sont heureux que l'on examine ce sujet de près.

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