Et toque!
Trois chefs étoilés militent pour réduire le gaspillage alimentaire

Trois chefs suisses étoilés font campagne contre le gaspillage alimentaire. Et suggèrent chacun une recette dont les plats seront vendus à un prix dérisoire.
Publié: 03.05.2022 à 11:59 heures
|
Dernière mise à jour: 03.05.2022 à 14:08 heures
Blick_Fabien_Goubet.png
Fabien GoubetJournaliste Blick

Ils sont plutôt bons élèves en la matière, mais ils tiennent à donner l'exemple. Trois chefs étoilés suisses s'engagent contre le gaspillage alimentaire dans le cadre d'une campagne organisée par Too Good To Go, l'entreprise qui veut nous faire jeter moins de nourriture à la poubelle grâce à une application aidant à écouler les invendus des commerçants près de chez nous.

Et pour nous en convaincre, Serge Labrosse (La Chaumière, Troinex), Pascal Steffen (Roots, Bâle) et Antonio Colaianni (Ornellaia, Zurich) ont chacun inventé une recette réalisée à partir de restes qui auraient très bien pu finir avec les déchets. Le meilleur dans tout ça, c'est que quelques chanceux pourront même les goûter.

Contenu tiers
Pour afficher les contenus de prestataires tiers (Twitter, Instagram), vous devez autoriser tous les cookies et le partage de données avec ces prestataires externes.

On jette 620 francs dans la poubelle chaque année

Les restaurants jettent un peu de nourriture certes, mais ce ne sont pas les pires, loin de là. Ils ne représenteraient avec le reste du commerce de détail que 7% du total. Le gros du gaspillage alimentaire, c'est nous, dans nos cuisines (40% du total) ainsi que les lieux de transformation (30%). En tout, ce sont plus de 2,5 milliards de tonnes de nourriture qui sont jetées chaque année dans le monde (dont 2,8 millions en Suisse) soit près de 40% de la production totale, d'après un rapport de l'Office fédéral de l'environnement paru en 2019.

Le pain perdu gastronomique (et salé) de Serge Labrosse
Photo: DR

Ce gâchis a un coût environnemental et humain considérable, mais aussi économique puisque nous jetons allègrement l'équivalent de 620 francs à la poubelle chaque année. «C'est comme si sur trois sacs de courses achetés tout au long de l'année, on en laissait toujours un à la caisse après l'avoir payé», illustre Aurélia Guillot, experte marketing chez Too Good To Go.

Retournons à nos fourneaux. J'ai pu rencontrer Serge Labrosse lundi 2 mai à Genève dans son école de cuisine, Les Ateliers by Serge Labrosse, où il attendait derrière un plan de travail recouvert de pommes de terre, d'asperges, d'herbes aromatiques et ail des ours, et alors que doraient tranquillement un bataillon de tranches de pain dans le four.

Serge Labrosse.
Photo: Fabien Goubet

Sa recette: «un pain perdu anti-gaspi» qui n'a rien à voir avec notre pain perdu habituel puisqu'il est salé, frais, et parfait pour une entrée printanière.

Contenu tiers
Pour afficher les contenus de prestataires tiers (Twitter, Instagram), vous devez autoriser tous les cookies et le partage de données avec ces prestataires externes.

À la recherche du pain perdu

Serge ne s'est pas trituré les méninges avant de mettre le pain au centre de sa proposition: «Ça a toujours été un souci le pain. Les poubelles des restaurants en sont remplies», lance-t-il d'emblée. Difficile de prévoir exactement les quantités nécessaires, précise-t-il, et le surplus n'est pas réutilisable le lendemain.

C'est donc pour éviter le gaspillage de ce produit que Serge a conçu ce pain perdu sublimé en plat gastronomique. Le pain rassis est d'abord infusé aux herbes dans du lait, et servi avec de la féra fraîche, de la féra fumée, et une ribambelle de petits assaisonnements au citron, à la groseille et au yaourt.

C'est mignon, c'est coloré, on dirait un dessert et en bouche, ce sont plusieurs types de fraîcheurs qui se succèdent, de celle du gel de citron qui vous met le sourire à celle plus subtile de la féra. On se verrait bien sauver la planète en dégustant ça à l'apéro tout l'été.

Et attention, pour celles et ceux qui habitent près de l'un de ces trois restaurants, ces plats sublimant les restes seront disponibles en quantités limitées via l'appli Too Good To Go chaque jour du 11 au 13 mai au prix dérisoire de 4,90 francs.

Le meilleur déchet? Celui qu'on ne crée pas

Histoire de nous faire bosser, Serge et son collègue nous ont fait préparer des gnocchis et des légumes printaniers et effectivement, rien n'a été jeté, pas même les tiges fibreuses des asperges qui ont servi à préparer un petit bouillon aromatique, pas plus que les peaux des patates qui finissent en farine.

Tout cela était évidemment délicieux, et donne envie de faire de même à la maison – même si évidemment, cette recette et les techniques observées lundi sont celles d'un chef étoilé difficilement reproductibles au quotidien chez soi dans sa cuisine de clochard aux couteaux pas aiguisés depuis Marignan.

Mais qu'importe – ce genre de campagne a le mérite de sensibiliser le public au gaspillage, qui peut être considérablement réduit ne serait-ce qu'en arrêtant de tout jeter dès la date de péremption dépassée, ou tout aussi simplement en prévoyant ses menus quelques jours à l'avance, ce qui permet d'acheter moins de denrées superflues (avez-vous besoin de ce superpack de 32 saucisses qui périment demain?), et ainsi d'avoir un frigo moins rempli et mieux organisé. Chiche?


Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la