Tapis rouge à Paris
Macron et les Européens peuvent-ils faire confiance à Biden?

Le président américain démarre à la mi-journée à l'Arc de Triomphe une visite d'État d'une journée en France. Question: est-il un commandant suprême allié fiable pour les Européens?
Publié: 08.06.2024 à 11:28 heures
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Dernière mise à jour: 08.06.2024 à 14:41 heures
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Richard WerlyJournaliste Blick

Joe Biden est-il le chef incontesté et incontestable du «monde libre», face à la Russie de Vladimir Poutine et à la Chine? Cette question se pose encore plus depuis les cérémonies du 6 juin en Normandie, en hommage au débarquement allié qui bouta les Nazis hors de France. Difficile aussi de ne pas avoir cette image en tête ce samedi, lors de la visite d’État d’une journée en France du président américain. Le protocole exceptionnel qui lui sera réservé, lors de la descente des Champs-Élysées derrière une escorte à cheval, témoigne à la fois de la reconnaissance de la République, 80 ans après le D-Day, mais aussi des liens entre le continent européen et les États-Unis en 2024. Alors?

L’évidence est que Joe Biden veut jouer ce rôle. Ses discours en Normandie, à Omaha Beach puis sur la pointe du Hoc, étaient tous centrés sur la défense de la liberté face aux «tyrans». Le président américain a, sur ce plan, une date dans le viseur: le sommet du 75e anniversaire de l’OTAN, l’Alliance atlantique, du 9 au 11 juillet à Washington. 

Impossible pour POTUS, l’acronyme pour «President of the United States», de ne pas envoyer, aux côtés des 31 autres pays-membres de la plus puissante coalition militaire mondiale, un signal très fort à Vladimir Poutine. A ce moment-là, les livraisons d’armes à l’Ukraine, longtemps bloquées par les Républicains à la Chambre des représentants, seront en cours de façon massive. Le costume de «Commandant en chef» sera plus que jamais celui de Joe Biden.

Sous un beau soleil parisien, les deux présidents ont déposé une gerbe et ravivé la flamme du Soldat inconnu. Ils devaient ensuite descendre l'avenue des Champs-Elysées encadrés par la Garde républicaine.
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Des alliés inquiets

Le problème est que le président sortant, qui affrontera Donald Trump dans un premier débat télévisé le 27 juin sur CNN, est l’objet de très vives critiques au sein de ses alliés. Le sujet le plus clivant, au sein de l’Alliance dont les pays membres sont liés par l’article 5 d’assistance mutuelle en cas d’agression, est la guerre à Gaza. Plusieurs pays membres de l’OTAN, à commencer par la Norvège d’où vient l’actuel secrétaire général Jens Stoltenberg (qui achèvera son mandat à Washington) viennent de reconnaître l’État de Palestine. Le «deux poids-deux mesures» est une critique récurrente entendue dans le monde entier, entre d’un côté des États-Unis défenseur de la liberté en Ukraine, et indifférents ou presque à l’oppression des Palestiniens, même si Washington réclame un cessez-le-feu.

Le discours de Biden à la Pointe du Hoc

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Le second sujet de divergences, qu’Emmanuel Macron va sans doute exposer et expliciter durant la visite d’État de Biden, est l’autonomie de la défense européenne. Le président Français en est le partisan acharné. Il vient d’ailleurs de prendre l’initiative d’une coalition d’instructeurs militaires pour former l’armée ukrainienne dans l’ouest du pays. Mais jusqu’où aller sans l’appui des États-Unis? Et jusqu’où aller sans courir le risque que Donald Trump, s’il est élu le 5 novembre prochain, renverse la table et place ses alliés le dos au mur, en cherchant un accord avec le Kremlin qui a dénoncé sa récente condamnation par un tribunal de New-York?

Paris a besoin de garanties. Et les autres alliés, au sein de l’OTAN, en ont encore plus besoin. L’Allemagne se fait toujours prier pour livrer des missiles longue portée Taurus à l’Ukraine. Les pays baltes redoutent une agression russe. Joe Biden doit agir dans les prochaines semaines pour démontrer qu’il ne fait pas que prononcer des discours en hommage au sacrifice e des vétérans en juin 1944.

Industrie de défense européenne

La capacité du président américain à convaincre les alliés de la solidité de l’Alliance est aussi indispensable pour faire taire dans ses rangs l’appétit de ceux qui rêvent d’un commandement européen distinct, voire d’un affaiblissement de l’OTAN. Les proeuropéens, comme Macron, défendent une puissance européenne souveraine, basée sur des industries de défense qui dépendraient beaucoup moins du complexe militaro-industriel américain. Les anti-Européens ou europhobes, à l’extrême droite comme à l’extrême gauche, proposent à leurs pays respectifs de se désengager de l’OTAN. 

C’est ce débat qui sera aussi en arrière-plan des élections européennes qui ont démarré le 6 juin et s’achèveront ce dimanche. Joe Biden doit délivrer à Paris un message de confiance. Parce qu’en face, surtout si les partis nationalistes gagnent du terrain lors du scrutin, Vladimir Poutine joue la montre et mise tout sur sa défaite présidentielle prochaine…

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