Ils veulent 70 chars de plus!
Indignés, les officiers s'opposent au transfert des Leopard à l'étranger

Des officiers suisses tirent la sonnette d'alarme. Ils mettent en garde contre le potentiel transfert de chars Leopard à la Pologne ou à l'Allemagne. Ils affirment même que notre pays a besoin de blindés supplémentaires, malgré les 96 Leopard inutilisés actuellement.
Publié: 31.01.2023 à 06:20 heures
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Dernière mise à jour: 31.01.2023 à 07:19 heures
Daniel Ballmer

La Société des officiers des troupes blindées (OG Panzer) s'oppose bec et ongles à la vente de chars Leopard suisses. Au Parlement, les politiciens chargés de la sécurité évoquent en effet l'idée de vendre au moins une partie des chars aujourd'hui remisés.

En effet, 96 chars Leopard 2 sont inutilisés depuis des années et stockés dans un hangar en Suisse orientale. Une partie pourrait être envoyée à des pays comme l'Allemagne ou la Pologne, qui livrent eux-mêmes des chars à l'Ukraine. Ces pays pourraient ainsi combler les manques apparus dans leur arsenal.

«Nous n'avons déjà pas assez de véhicules aujourd'hui»

Mais les officiers ne veulent pas en entendre parler. L'OG Panzer reproche aux parlementaires d'avoir osé proposer cet arrangement: la vente de chars est donc à rejeter catégoriquement, selon elle. Au contraire, les chars Leopard désaffectés devraient être réactivés et mis à jour grâces aux technologies les plus récentes.

Alors que l'Europe cherche désespérément des blindés lourds, 96 d'entre eux sont inutilisés en Suisse orientale.
Photo: Keystone
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«Aujourd'hui déjà, nous n'avons pas assez de véhicules pour toutes les troupes, précise Erich Muff, le président de la société des officiers. Les véhicules sont uniquement utilisés durant les cours de répétition: chaque bataillon s'entraîne toujours successivement sur les mêmes chars.» Mais pour les situations d'urgence, les chars disponibles ne suffiraient déjà pas aujourd'hui: «Nous ne pourrons ainsi pas mener à bien notre mission de défense nationale en cas d'intervention extraordinaire.»

300 chars Leopard pour assurer la défense du pays?

Erich Muff fait le calcul: pour la défense nationale, il faudrait au total au moins trois brigades blindées mécanisées. Avec les réserves, ce sont plus de 300 chars Leopard qui seraient nécessaires. Actuellement, 134 chars sont en service. À cela s'ajoutent les 96 véhicules placés en hangar, soit 230 unités au total.

«Nous avons déjà trop peu de chars. Nos politiciens chargés de la sécurité devraient se rendre compte de ça», estime Erich Muff. Les chars nécessaires ont été mis au rebut uniquement sous la pression économique: «L'armée suisse n'est plus conçue qu'en fonction du budget!»

Or, c'est justement en tant que pays neutre que la Suisse doit pouvoir se défendre elle-même. Le président de la société des officiers est convaincu qu'il est temps d'orienter les moyens militaires vers les menaces réelles: «S'il y a une chose que la guerre en Ukraine montre sans fard, c'est qu'on ne peut compter que sur ses propres forces armées.»

«Nous n'en avons tout simplement pas besoin»

La conseillère nationale PLR Maja Riniker et ses collègues (de tous bords politiques) voient les choses tout autrement. Ils veulent donner les chars inutilisés à des pays comme l'Allemagne. Lors d'une première tentative, l'élue argovienne avait toutefois échoué avec sa proposition de céder les chars pour le prix symbolique d'un franc au sein de la Commission de la politique de sécurité.

Elle remettra toutefois le sujet sur le tapis lors de la session de printemps, car il est aussi dans l'intérêt de la Suisse que l'Ukraine puisse continuer à se défendre, souligne-t-elle.

Maja Riniker s'attend à ce que l'armée suisse réutilise un jour quelques-uns des presque 100 chars remisés. Mais même dans ce cas, il resterait encore suffisamment de Leopard dont la Suisse pourrait se défaire. «Nous n'en avons tout simplement pas besoin», affirme la politicienne, qui a ainsi déclenché une tempête d'indignation chez les officiers.

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