L'UDC et le MCG vainqueurs... au détriment du PLR et du Centre
Genève n'a-t-elle (enfin) plus la droite la plus bête de Suisse?

Pour la première fois, la droite genevoise élargie — le Centre, le PLR, l'UDC et le MCG — ont formé une alliance pour les élections fédérales. Un pari réussi... pour les plus à droite de la droite, du moins. Débriefing avec le PLR et le Centre.
Publié: 23.10.2023 à 18:23 heures
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Dernière mise à jour: 24.10.2023 à 13:05 heures
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Daniella GorbunovaJournaliste Blick

En cuisine, il est rare de réussir une nouvelle recette du premier coup. En politique, les conservateurs genevois ont eu plus de chance, en ce dimanche d'élections fédérales. Pour la première fois, toute la droite élargie est partie unie à l'assaut du Parlement. Et ce fut un succès, même si le menu servi ne vaut pas trois étoiles au Michelin.

Pourquoi ce constat mi-figue mi-raison? Parce que l'apparentement des listes du Parti libéral-radical (PLR), de l'Union démocratique du centre (UDC), du Mouvement citoyens genevois (MCG) et du Centre a surtout profité au MCG et à l'UDC, faisant logiquement quelques déçus.

Soutenir Poggia et Amaudruz

Absent à Berne, le mouvement «anti-frontaliers» a pu placer deux élus au Conseil national, alors que le nombre de sièges des autres partis de l'entente n'a pas bougé. Aux États, bien que le ballotage soit général, la locomotive du MCG, Mauro Poggia, a réalisé le meilleur score du premier tour parmi les candidats de droite, suivi par Céline Amaudruz.

L'alliance de la droite genevoise a bien fonctionné... sauf pour Vincent Maitre (Centre) et Simone de Montmollin (PLR).
Photo: keystone-sda.ch
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Qu'est-ce que cela signifie, pour l'alliance? Selon les termes posés en amont du 22 octobre, le PLR et le Centre devraient ainsi, en théorie, porter et soutenir les candidatures de Céline Amaudruz (UDC) et de Mauro Poggia (MCG) au second tour de l'élection au Conseil des États, face aux deux sortants de gauche.

Les partis de la droite dite traditionnelle vont-ils réussir à ravaler leur fierté blessée, pour soutenir concrètement des têtes d'affiche qui ne sont pas les leurs? Officiellement, ils répondent par l'affirmative. Mais l'alliance au second tour n'a pas encore été véritablement réaffirmée depuis dimanche. Et le Centre, notamment, n'en pense pas que du bien. De quoi faire vaciller le quartet?

Le PLR et le Centre rentrés bredouilles

Lundi matin, Vincent Maitre, candidat aux États arrivé en sixième position, admet que son parti n'a rien gagné à cette «grande alliance»: «On constate que les apparentements ont surtout profité à l’UDC et au MCG. Pour le Conseil des États, les électeurs de ces deux partis ont été très disciplinés, en votant presque exclusivement pour Céline Amaudruz (UDC) et Mauro Poggia (MCG) — les deux ensemble. Tandis que les électeurs du PLR et du Centre ont voté de manière beaucoup plus éparse, avec des combinaisons de candidats plus variées. C'est ce qui explique aussi le décrochage de Simone de Montmollin (PLR)...»

Du côté du PLR, le président de la section genevoise, Pierre Nicollier, attrapé dimanche à Uni Mail entre deux interviews télévisées, pèse davantage ses mots: «Nous n’avons pas perdu de sièges. Donc il n’y a pas d’amertume de notre côté. Mais il est vrai que nous n’avons pas non plus réussi à croître, et donc à convaincre les électeurs...»

Malgré sa déception, le PLR va-t-il bel et bien tenir sa promesse et soutenir les candidats UDC et MCG pour l'élection aux États? «C’est le jeu de l’alliance, enchaîne Pierre Nicollier. Nous avions en effet décidé de lancer les deux candidats qui auraient le plus de chances d’être élus au second tour. Mais ceci est du ressort de l’Assemblée des délégués, qui doit encore valider la stratégie.» Quoi qu'il en soit, Céline Amaudruz a d'ores et déjà annoncé sa candidature au second tour des États dans la foulée de son excellent score, dimanche, sur le plateau télé de la chaîne Léman Bleu.

Deux sièges «perdus»?

Quant au Centre (qui est, de notoriété publique, remonté comme un coucou contre le MCG et l'UDC), soutiendra-t-il ses «partenaires»? Pendant encore quelques semaines, du moins. «Mais une fois les échéances électorales passées, chaque parti va continuer à vivre sa vie. Le Centre ne se sent pas attaché à cet accord au-delà de ça.», précise Sébastien Desfayes, le chef de groupe des centristes au parlement genevois, contacté lundi matin.

Malgré les loyautés de circonstance de son parti, le politicien ne se gêne par ailleurs pas de tacler ses confrères du MCG élus au Conseil national: «Daniel Sormanni et Roger Golay n’auront pas de groupe parlementaire. Ils vont donc être perdus dans la masse. Je ne pense pas que le MCG puisse peser à Berne. À mon avis, ce sont deux sièges un peu perdus pour rien.»

MCG cherche groupe parlementaire

Un autre membre du Centre, qui a n'a pas souhaité être nommé, de peur de représailles, mâche encore moins ses mots, lorsqu'on lui demande ce que lui évoque le succès de ses «alliés»: «Nous avons vu, au Grand conseil de Genève, que Monsieur Golay est l’un des députés les plus inefficaces. Il n’a déposé presque aucun texte. Ni lui, ni Monsieur Sormanni (MCG) ne parlent un traitre mot d’allemand. À mon avis, ça va être compliqué. Ils vont regarder passer les trains, quel que soit le groupe parlementaire auquel ils se grefferont.»

Roger Golay réfute ces accusations: «J’ai déposé plus d’une centaine de textes, lorsque je siégeais au Conseil national (ndlr: de 2013 à 2019). Ce qui est énorme. Dire que je suis inefficace est une attaque gratuite — j’ai déposé un texte au parlement genevois il y a trois semaines, alors que je viens de commencer à y siéger.» 

Interrogé à ce sujet dimanche dans le cadre d'une interview, Mauro Poggia — la tête de proue du Mouvement — a répondu à Blick que des discussions étaient en cours quant au groupe qui accueillera les outsiders à Berne (à compter qu'ils aillent tous dans le même).

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