L'Israélien est banni de son équipe nationale
Munas Dabbur, les heures sombres de l'ancien roi des buteurs suisses

L'ancienne star de Grasshopper Munas Dabbur a déclenché une polémique en Israël en publiant une citation du Coran. Un an plus tard, ce musulman pratiquant s'est discrètement retiré de l'équipe nationale et manquera le match contre la Suisse.
Publié: 28.03.2023 à 07:14 heures
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Sebastian Rieder

La Suisse attend l’équipe d’Israël ce mardi soir à Genève. Le footballeur israélien le plus connu dans le pays est sans aucun doute Munas Dabbur. L’attaquant avait terminé meilleur buteur de Super League en 2016 lorsqu’il avait inscrit 19 buts avec GC. Malheureusement, le natif de Nazareth ne sera pas sur le terrain. Il n’est plus appelé en équipe nationale et vit une longue descente aux enfers depuis une année.

Exemple le plus récent de sa malchance, le 18 mars contre Hertha Berlin. Remplaçant, il est expulsé du terrain deux minutes après son entrée en jeu. La faute à un tacle trop fougueux. Hoffenheim remporte tout de même ce duel du bas de classement 3 à 1, mais Munas Dabbur écope ensuite d’une suspension de trois matches. Un carton rouge qui tombe mal alors qu’il doit déjà se battre pour une place de titulaire en club.

Une blessure le stoppe en plein succès

Cette situation est surprenante pour ce musulman pratiquant. Il y a six mois encore, lorsque André Breitenreiter est arrivé dans le club allemand après son titre avec le FC Zurich, son avenir semblait radieux. «Dès le début, nous avons eu un très bon contact. Surtout grâce à nos expériences en Suisse. Nous avons beaucoup parlé de la Super League et des derbys zurichois. Bien sûr, nous avons aussi parlé des problèmes du FCZ après son départ.»

Munas Dabbur traverse une période difficile.
Photo: DUKAS

L’entente entre les deux «Suisses» se ressent sur le terrain. Munas Dabbur enthousiasme André Breitenreiter et marque au début presque un match sur deux. «J’ai eu le meilleur début de saison possible, explique le footballeur israélien. L’équipe était de bonne humeur, tout se déroulait parfaitement.» Hoffenheim s’installe dans le premier tiers du classement, et Munas Dabbur devient titulaire. Jusqu’à ce jour d’octobre où il tombe sur l’épaule à l’entraînement.

Le diagnostic fait mal: une déchirure des ligaments, là où la clavicule et l’omoplate sont reliées. L’Israélien serre les dents et continue à jouer pendant deux semaines, «mais cela a empiré les choses». Pour éviter une opération, il s’implique pleinement dans sa thérapie et s’arme de patience. L’hiver sera sombre pour l’attaquant.

Son passage en Suisse? Le déclic

Coïncidence ou non, Hoffenheim entre dans une spirale négative et s’enfonce dans les profondeurs du classement. Ce n’est qu’en janvier que Munas Dabbur se remet complètement de son accident. Il se bat pour revenir dans l’équipe. Lors du troisième match après son retour, il réussit une passe décisive, mais s’incline 5-2 contre Bochum. L’entraîneur est limogé, au plus grand regret de l’ancienne star de Grasshopper. L’attaquant confie à Blick, son amour pour la Suisse, qui perdure encore aujourd’hui. «GC est mon premier grand amour de football. C’était mon premier gros transfert.»

Il se souvient avec fierté du mois de février 2014 et du changement radical de culture et de climat. «J’ai vu de la neige pour la première fois de ma vie au cours d’un entraînement.» Malgré le froid, l’accueil à Zurich est chaleureux. «Je me suis senti très à l’aise dès le début. Les gens du club et les supporters m’ont très bien accueilli, souligne Munas Dabbur. Ce qui a certainement aussi aidé, c’est que j’ai marqué beaucoup de buts très rapidement.» Lors de sa deuxième saison, il y a un bref flirt avec l’US Palermo. Mais l’accord avec le club de Serie A échoue, car l’offre des Siciliens est trop modeste pour GC.

Après la Suisse, l’Autriche

Après trois ans, Munas Dabbur quitte le Rekordmeister en tant que meilleur buteur de la Super League pour rejoindre Salzbourg. Au sein de l’école de football de Red Bull, il poursuit son ascension et marque 44 buts en 76 matchs. Le FC Séville l’attire alors dans ses rangs. Son aventure en Andalousie n’est rien de plus qu’un voyage. Après quelques mois sans grand temps de jeu, il retourne dans le froid – à Hoffenheim. Il y apprécie la proximité de la Suisse. Le Bürgenstock? L’un de ses endroits préférés. Sa femme et sa fille de bientôt trois ans s’y sentent au paradis.

Il aurait aimé jouer mardi à Genève pour le match de qualification pour l’Euro de la Suisse contre Israël. D’autant plus qu’il n’a jamais joué contre la Suisse dans sa carrière. La dernière rencontre a eu lieu à Bâle en 2009 et s’est terminée sur un score de 0 à 0.

Cette année, il s’attend à tout sauf à un score nul. «Ce sera un match très difficile pour Israël – la Suisse est en forme», affirme-t-il, tout excité. Il semble ne pas s’être encore résigné à devoir suivre le match de sa vie à la télévision. Son départ de l’équipe nationale ne paraît pas avoir été digéré.

Une publication Instagram désastreuse

Après les émeutes sanglantes entre juifs et palestiniens sur le Mont du Temple à Jérusalem en 2021, il publie via Instagram une photo du Dôme du Rocher et cite le Coran: «Dieu se vengera des pécheurs.» Cette déclaration déclenche une vague de haine de la communauté juive, bien que des joueurs d’origine arabe se soient établis dans l’équipe nationale d’Israël et que Munas Dabbur soit considéré comme l’international d’origine arabe le plus performant. Il est insulté sur le Net et plus tard également sur le terrain.

Ses quinze buts pour Israël sont oubliés. Bien que le public le siffle sans pitié, l’entraîneur et les joueurs le soutiennent, tout comme la fédération. Il joue encore un an et marque sept buts en onze matches. Mais les fans l’ont pris en grippe.

La politique est plus forte que le sport. Après 40 matches internationaux, il tire un trait douloureux sur sa carrière. «Bien sûr, j’aurais souhaité que les huit années passées en équipe nationale soient reconnues à leur juste valeur. Mais je devais accepter les choses telles qu’elles étaient», déclare-t-il, en parlant de responsabilité envers lui-même et sa famille. «Les deux dernières années n’ont pas été faciles pour moi. C’est pourquoi j’ai décidé de prendre ma retraite.»


Credit Suisse Super League 24/25
Équipe
J.
DB.
PT.
1
FC Lugano
FC Lugano
6
4
13
2
Servette FC
Servette FC
6
-3
12
3
FC Zurich
FC Zurich
5
6
11
4
FC Lucerne
FC Lucerne
6
4
11
5
FC Bâle
FC Bâle
6
9
10
6
FC St-Gall
FC St-Gall
5
5
10
7
FC Sion
FC Sion
6
4
10
8
Yverdon Sport FC
Yverdon Sport FC
6
-4
5
9
Grasshopper Club Zurich
Grasshopper Club Zurich
6
-4
4
10
FC Lausanne-Sport
FC Lausanne-Sport
6
-7
4
11
FC Winterthour
FC Winterthour
6
-7
4
12
Young Boys
Young Boys
6
-7
3
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