Jets de pierres, cocktails molotov...
Les syndicats et le gouvernement français, otages des casseurs

Les affrontements ont duré toute la journée à Paris, place de la Nation, pour ce 1er Mai très attendu. La présence de centaines de casseurs a pris le pas sur le cortège syndical pacifiste.
Publié: 01.05.2023 à 18:52 heures
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Dernière mise à jour: 01.05.2023 à 20:28 heures
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Richard WerlyJournaliste Blick

Qui sont-ils? S’agit-il de provocateurs, de jeunes radicalisés des milieux d’ultragauche, ou bien de simples délinquants venus chercher l’affrontement avec les forces de l’ordre? Quelle que soit la réponse à cette question, le spectacle du 1er mai 2023, à Paris et à Lyon notamment, a démontré que le dialogue social est sabordé en France par ceux qui préfèrent s’en prendre à la police.

À Paris, place de la Nation, épicentre des émeutes, un policier est tombé, blessé et brûlé par un jet de cocktail molotov. Une façade a été incendiée. 108 policiers ont été bléssés ce 1er mai à travers le pays. Impossible, dans ces conditions, de retrouver la sérénité politique qui fait tant défaut en France. Les 780'000 manifestants à travers la France, selon les chiffres du Ministère de l’Intérieur (près de 2 millions selon les syndicats) ont été pris en otage, ce lundi, alors que les syndicats défilaient unis, pour la première fois depuis 2009.

Le pire est que tout cela était malheureusement prévu. Et que la nuit pourrait être encore pire à Paris, où des mots d’ordre ont été lancés sur les réseaux sociaux pour affronter la police du côté de la place de l’Opéra, au cœur des quartiers touristiques de la capitale française. Quel contraste avec les manifestations dans de nombreuses villes de France, où les rassemblements du 1er Mai se sont déroulés dans le calme!

Les guichets des agences bancaires sont devenus l'une des cibles favorites des casseurs sur le trajet des manifestations contre la réforme des retraites.
Photo: DUKAS
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Difficile, face à de telles images, de préjuger de ce que sera la suite des événements. Le Conseil constitutionnel français doit examiner mercredi 3 mai une seconde demande de référendum. Si elle est à nouveau rejetée, comme cela a été le cas une première fois le 14 avril, alors les syndicats unis n’auront guère d’autres choix que de reprendre le chemin de la négociation avec le président et le gouvernement. Mais le spectacle des violences urbaines n’est pas de bon augure.

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La présence d’un millier d’émeutiers au sein des cortèges syndicaux avait été annoncée par les forces de l’ordre. Plusieurs villes sont, depuis le début du mouvement d’opposition à la réforme des retraites, le théâtre d’affrontements entre policiers et jeunes encagoulés, vêtus de noir, souvent présentés hâtivement comme membres du «black bloc», cette mouvance anarchiste très présente en Allemagne, mais aussi connue pour ses faits d’armes à Zurich.

Ils manient les lance-pierres, les bouteilles enflammées remplies d’essence, les mortiers de feux d’artifice. Ils prépositionnent leurs moyens dans des coffres de voitures garées à proximité durant la nuit. Ils repèrent les installations urbaines inflammables: kiosques à journaux, garages à vélos, bornes électriques d’alimentation, abribus. Depuis le début des manifestations début janvier, plus d’un millier de protestataires ont été arrêtés, et plusieurs centaines de personnes ont été jugées en comparution immédiate. Mais la violence n’a pas diminué pour autant.

Des boulons et des clous hier, des cocktails molotov aujourd’hui

«Avant, ils balançaient des boulons et des clous. Maintenant, ils nous visent avec des armes préparées à l’avance: cocktails molotov, haches et arbalètes», ont déclaré à «Paris Match» des policiers blessés. Pour éviter le pire, des médecins d’urgence sont désormais intégrés au sein des pelotons de gendarmes mobiles, les forces d’intervention anti-émeutes. Une centaine de psychologues travaillent aussi étroitement avec ces unités, sans cesse mobilisées depuis le début de l’année.

Nantes, Rennes, Bordeaux, Toulouse, Lyon et bien sûr Paris sont les villes les plus exposées à ce déluge de violences dont les syndicats, et les partisans d’une reprise des négociations sociales, sont les premières victimes. Lundi 1er mai, le cortège syndical de près de 120'000 manifestants s’est déroulé dans le calme à Paris. Mais toute la journée, les caméras ont focalisé sur les affrontements de la place de la Nation.

La France «ensauvagée»? L’expression est du ministre de l’Intérieur, Gérard Darmanin, très critiqué pour l’importance du déploiement policier, pour l’intervention de brigades mobiles motorisées (les BRAV-M) et pour le recours aux drones de surveillance. À voir les images de ce 1er mai, c’est bien cette impression qui ressort.

Une fausse impression, car la majorité du pays est restée calme. Mais ces émeutes nourrissent malheureusement toutes les théories, y compris celles de l’infiltration d’éléments violents par des policiers. La France a besoin «d’apaisement», a plusieurs fois répété Emmanuel Macron. À ce stade, on ne voit pas comment cela est possible à court terme, si un arrêt des protestations et des défilés n’intervient pas.

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